• Un amoureux fou vint frapper à la porte de sa bien-aimée.
    Elle demanda derrière la porte :
    "Qui est là?"
    Il répondit :
    "C'est moi !"
    Elle dit :
    "Il n'y a pas de place pour toi et moi dans la même maison."

    Alors il s'en alla méditer dans le désert et, des années plus tard, il revint frapper à sa porte.
    La voix de sa bien-aimée demanda :
    "Qui est là ?"
    Il répondit :
    "C'est toi-même".

    Et la porte s'ouvrit.


                                           D'après le poète mystique arabo-andalou Ibn' Arabi.


    6 commentaires



  • Au soir de sa mort, un derviche arriva à la porte du paradis.
    Emerveillé et fou de joie, il demanda au portier :

    "Pourquoi suis-je ici ? Est-ce parce que j'ai beaucoup prié, toute ma vie durant ?
    - Non, non... lui dit le portier en souriant.
    - Serait-ce donc parce que j'ai beaucoup jeûné ?
    - Mais non... tu n'y es pas du tout !
    - Mais alors pourquoi donc ?
    - Eh bien, je vais te le dire ! Une nuit d'hiver à Bagdad, une nuit où il faisait très froid, tu as recueilli une petite chatte abandonnée, et tu l'as réchauffée dans ton manteau. C'est pour avoir allégé ses souffrances que tu es ici, à la porte du paradis ! "


                                                                                       Parabole soufie



    14 commentaires




  • Un hippopotame traversait un marigot lorsque, soudain, l'un de se yeux se détacha et tomba au fond de l'eau. L'hippopotame se mit alors à chercher de tous côtés. Il tournait et retournait sur lui-même, fouillait à gauche, à droite, devant et derrière lui. Mais il ne trouvait pas trace de son oeil.

    En le voyant faire, les oiseaux du fleuve ne cessaient de lui crier :
    "Calme-toi ! Mais calme-toi donc !"
    Mais l'hippopotame affolé ne les entendait pas. Il lui fallait absolument retrouver son oeil perdu.

    Alors les poissons et les grenouilles joignirent leurs voix à celles des oiseaux :
    "Calme-toi, hippopotame ! Mais calme-toi donc !"

    Finalement, l'hippopotame finit par les entendre. Il s'immobilisa et les regarda.
    Aussitôt, la vase et la boue qu'il soulevait en pataugeant se posèrent au fond du marigot. Et entre ses pattes, dans l'eau redevenue claire, l'hippopotame aperçut son oeil. Il le ramassa et le remit à sa place.

                                                                                  
                                                                                      Conte africain.



    31 commentaires






  • Il était une fois un grand jardin merveilleux au milieu d'un royaume.

    Le Maître aimait à s'y promener quand la chaleur du jour devenait accablante. Il affectionnait tout particulièrement le bambou, qui lui semblait l'arbre le plus beau de toutes les plantes de son jardin. Au fil des années, le bambou grandissait, devenait vigoureux et toujours plus conscient de la faveur du Maître.


    Un jour, celui-ci s'approcha de l'arbre et le bambou inclina son faîte respectueusement. Le Maître lui dit :

    " Mon cher bambou, j'ai besoin de toi."

    Il semblait que le grand jour fut enfin arrivé, le jour pour lequel le bambou avait été créé. Le bambou répondit donc d'une voix douce :

    " Maître, je suis prêt. Fais de moi ce que tu voudras.

    - Bambou, ajouta le Maître d'une voix solennelle, pour me servir de toi, il faut que je te coupe.

    - Me couper, moi que tu considères comme la plus belle parure de ton jardin ! Non, ne fais pas cela !

    - Mon cher bambou, répondit le Maître, si je ne te coupe pas, tu ne me sers de rien."


    Le jardin se fit calme; le vent retint son souffle. Le bambou inclina la tête doucement, puis murmura:

    " Maître, puisque tu ne peux m'utiliser sans me couper, alors je suis prêt. Arrache-moi.

    - Mon cher bambou, il me faudra t'enlever toutes les branches et toutes les feuilles.

    - Ah ! non, pas cela ! Détruis ma beauté, mais laisse-moi mes rameaux et mes feuilles.

    - Si je ne te les enlève pas, je ne peux pas t'utiliser."


    Le soleil se cacha, un papillon s'envola et le bambou, tremblant à l'idée de ce qui allait lui arriver, dit dans un souffle :

    " Maître, enlève mes rameaux et mes feuilles.

    - Bambou, dit encore le Maître, il faudra te faire autre chose : je te couperai par le milieu et je t'enlèverai le cœur. Si je ne le fais pas, tu ne me sers de rien.

    - Oui, Maître... arrache le cœur et découpe."


    Alors le Maître du jardin arracha le bambou, coupa ses rameaux et toutes ses feuilles, le tailla en deux sur toute sa longueur et lui enleva le cœur.


    Puis, il le transporta près d'une source d'eau fraîche et scintillante, au milieu des champs desséchés. Il déposa le bambou soigneusement sur le sol; il posa l'une des extrémités du tronc sous la source, tandis que l'autre atteignait le sillon d'arrosage dans le champ.

    La source chanta sa joie, l'eau claire bondit à travers le corps déchiqueté du bambou jusque dans le canal et se mit aussitôt à abreuver les champs assoiffés. On repiqua le riz et les jours s'écoulèrent. Les pousses grandirent et ce fut bientôt le temps de la moisson.
    C'est ainsi que le bambou, autrefois si majestueux, devint, dans son humble état de débris, une grande bénédiction.


    Quand il était encore grand et beau, il ne poussait que pour lui-même et se réjouissait de sa beauté. Mais dans son brisement, il était devenu un canal dont le Maître se servait pour faire fructifier son Royaume.


                                                                                             Conte chinois



                   (c) Ptitsa




    11 commentaires



  • C'était la famine.
    Mais tout le monde ne mourait pas de faim pour autant : les riches avaient pris soin de remplir leurs greniers de blé, d'huile et de légumes secs.
    Khadidja dit alors à Nasreddine, son mari :

    "La vie dans le village est devenue intolérable : la moitié des gens est très riche, pendant que l'autre moitié n'a pas de quoi manger. Si toi, qui es respecté de tous, tu arrivais à convaincre les premiers de partager leurs richesses, alors tout le monde vivrait heureux.
    - Tu as absolument raison, femme, j'y vais de ce pas."

    Nasreddine quitta la maison et ne revint que le soir, complètement épuisé.

    " Alors, lui demanda Khadidja avec impatience, tu as réussi ?
    - A moitié !
    - Comment cela, à moitié ?
    - Oui : j'ai réussi à convaincre les pauvres ."


                                                                        
                                                                   Parabole de Nasreddine Hodja



    21 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique