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Ô vie heureuse des bourgeois !
Qu'avril bourgeonne
Ou que decembre gèle,
Ils sont fiers et contents.
Ce pigeon est aimé
Trois jours par sa pigeonne :
Ça lui suffit, il sait
Que l'amour n'a qu'un temps.
Ce dindon a toujours
Béni sa destinée,
Et quand vient le moment
De mourir, il faut voir
Cette jeune oie en pleurs :
" C'est là que je suis née,
Je meurs près de ma mère
Et je fais mon devoir."
Elle a fait son devoir,
C'est à dire que onques
Elle n'eut de souhait
Impossible, elle n'eut
Aucun rêve de lune,
Aucun désir de jonque
L'emportant sans rameurs
Sur un fleuve inconnu.
Et tous sont ainsi faits
Vivre la même vie
Toujours pour ces gens là
Cela n'est point hideux.
Ce canard n'a qu'un bec
Et n'eut jamais envie
Ou de n'en plus avoir
Ou bien d'en avoir deux.
Ils n'ont aucun besoin
De baiser sur les lèvres
Et loin des songes vains,
Loin des soucis cuisants,
Possèdent pour tout cœur
Un viscère sans fièvre,
Un coucou régulier
Et garanti dix ans.
Ô les gens bien heureux...
Tout à coup, dans l'espace,
Si haut qu'ils semblent aller
Lentement, en grand vol,
En forme de triangle...
Arrivent, planent et passent...
" Où vont ils? Qui sont-ils ?
Comme ils sont loins du sol !"
Regardez les passer : eux,
Ce sont les sauvages.
Ils vont où leur desir
Le veut, par dessus monts
Et bois, et mers, et vents,
Et loin des esclavages,
L'air qu'ils boivent
Ferait éclater vos poumons.
Regardez-les : avant
D'atteindre sa chimère,
Plus d'un, l'aile rompue,
Et du sang plein les yeux,
Mourra. Ces pauvres gens
Ont aussi femme et mère
Et savent les aimer
Aussi bien que vous, mieux...
Pour choyer cette femme
Et nourrir cette mère,
Ils pouvaient devenir
Volailles comme vous,
Mais ils sont avant tout
Des fils de la chimère,
Des assoiffés d'azur
Des poètes, des fous.
Regardez-les, vieux coqs,
Jeune oie édifiante,
Rien de vous ne pourra
Monter aussi haut qu'eux,
Et le peu qui viendra
D'eux à vous,
C'est leur fiente.
Les bourgeois sont troublés
De voir passer les gueux.
Georges BRASSENS
Ecoutez-la chantée par Maxime LE FORESTIER... C'est une splendeur.
24 commentaires -
S'il suffisait de s'asseoir jambes repliées pour méditer, toutes les grenouilles seraient des Bouddhas.
Proverbe zen.
14 commentaires -
78 de blog rank, 3e jour...
toujours grâce à VOUS !
Encore 5 jours à tenir pour passer en mode "Privilège".
Mon conseiller OB perso m'apprend que ce qui fait augmenter le BR,
c'est moins le nombre de pages ouvertes
que le temps passé sur celles que vous ouvrez.
Donc, s'il vous plaît, feignez de trouver mes publications super intéressantes
et d'être plongés dans leur lecture jusqu'au cou
plutôt que de cliquer tous azimuts... :D
Je vais réfléchir à quelques pavés bien indigestes à vous soumettre
dans la semaine à venir pour vous obliger à rester scotchés à votre écran,
les méninges en compote et le clic-souris fébrile.
Mais non, rassurez-vous, je n'en ferai RIEN.
Je compte sur votre gentillesse, c'est bien plus porteur.
Je suis sûre que chacun d'entre vous trouvera comment m'aider,
à sa manière, selon ses possibilités et ses disponibilités.
Et même si finalement on n'y arrive pas, la gentillesse, c'est gratuit...
et ça ne s'épuise pas, quel que soit l'indice de blog rank affiché du jour.
MERCI
à vous tous.
Ptitsa, le petit colibri.
28 commentaires -
Et une femme parla, disant : " Parlez-nous de la Douleur."
Et il dit :
"Par la douleur se brise la coquille qui enveloppe votre entendement.
De même que le noyau du fruit doit se rompre pour que son coeur puisse s'offrir au soleil, ainsi vous devez connaître la douleur.
Et pourriez-vous maintenir votre coeur dans l'émerveillement du miracle quotidien de votre vie, votre douleur n'apparaîtrait pas moins merveilleuse que votre joie ;
Et vous accepteriez les saisons de votre coeur, de même que vous avez toujours accepté les saisons qui passent sur vos champs.
Et vous veilleriez avec sérénité à travers les hivers de votre tristesse.
Une grande part de votre douleur est choisie par vous-même.
C'est la potion amère par laquelle le médecin en vous guérit votre moi malade.
Faites donc confiance au médecin et buvez sa potion en silence et tranquillité;
Car sa main, quoique lourde et dure, est guidée par la main bienveillante de l'Invisible,
Et la coupe qu'il offre, bien qu'elle brûle vos lèvres, a été façonnée de l'argile que le Potier a mouillée de Ses propres larmes sacrées".
Khalil GIBRAN, "Le prophète"
Traduction de l'anglais : Camille ABOUSSOUAN
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